Michel Martelly, Reynold Deeb, Youri Latortue, Prophane Victor indexés dans un rapport de l’ONU pour leur liens avec les gangs

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Michel Martelly, Reynold Deeb, Youri Latortue, Prophane Victor indexés dans un rapport de l’ONU

Dans un rapport final, les membres du Groupe d’experts créé par la résolution 2653 (2022) du Conseil de sécurité des Nations Unies et mandaté pour aider le conseil et son Comité sur Haïti à s’acquitter de leurs fonctions, notamment en fournissant des informations pertinentes pour la désignation éventuelle d’individus et d’entités visés par une mesure de gel des avoirs et d’une interdiction de voyager pour les individus, quatre personnalités dont l’ancien président de la République, Michel Joseph Martelly ont été indexés pour leur lien présumé avec les gangs qui sèment la terreur dans le pays.

Dans la partie 3 du rapport intitulé : Informations pouvant servir à désigner des personnes ou entités qui se seraient livrées, directement ou indirectement, à des activités menaçant la paix, la sécurité ou la stabilité d’Haïti, les experts désignés par le Conseil de sécurité ont développé une sous partie : Financement des gangs incluant liens entre les acteurs politiques et économiques et les gangs. Les informations ont été obtenues lors d’entretiens avec des personnes vivant dans des zones contrôlées par des gangs, des analystes nationaux, des acteurs économiques, des hommes politiques et des responsables gouvernementaux travaillant sur la question des gangs. Ce rapport a fourni un ensemble de détails sur l’implication présumée de Michel Martely, Reynold Deeb, Youri Latortue, Prophane Victor dans l’activité des gangs.

A propos du chef du mouvement Tet Kale, Michel Martelly, il s’est servi des gangs pour étendre son influence dans les quartiers afin de faire avancer son agenda politique, contribuant ainsi à un héritage d’insécurité dont les effets se font encore sentir aujourd’hui, ont rapporté les experts. Ils disent avoir reçu des informations selon lesquelles, pendant son mandat, M. Martelly a financé plusieurs gangs, tels que Base 257, Village de Dieu, Ti Bois et Grand Ravine, notamment en leur fournissant des fonds ou des armes à feu.

D’après plusieurs sources, M. Martelly a créé la Base 257, qui a été financée et armée au fil du temps pour empêcher les manifestations contre le pouvoir à Pétion- Ville, notamment à partir de 2014, poursuit le Groupe d’experts. Ce gang est régulièrement mêlé à des meurtres, des enlèvements, des vols et au trafic de drogue. M. Martelly est également passé par des intermédiaires, notamment des fondations ou des membres de sa garde rapprochée, pour établir des relations et négocier avec d’autres gangs. Ainsi, Arnel Joseph, l’ancien chef du gang de Village de Dieu, a déclaré qu’il s’entretenait régulièrement avec un intermédiaire travaillant dans l’unité de protection rapprochée de M. Martelly, ajoutant que cet intermédiaire lui donnait des armes à feu et d’importantes sommes d’argent. Dans une vidéo, Ti Lapli, l’un des chefs actuels de Grand Ravine, explique que l’ancien Président a remis à Tet Kale (ancien chef de Grand Ravine) un fusil Galil 5,56 mm appartenant à la police et un fusil de même type à Chrisla, chef du gang de Ti Bois.

Reynold Deeb

Le Groupe d’experts dit avoir des preuves selon lesquelles Reynold Deeb, Directeur général du Groupe Deka, un important importateur de biens de consommation, qui fait l’objet de sanctions par le Canada, finance des membres de gangs pour protéger son entreprise et assurer le transport des marchandises qu’il importe. En 2017, M. Deeb a payé un chef de gang afin de pouvoir mener ses activités dans l’un des principaux ports. Plus récemment, d’après plusieurs sources indépendantes, M. Deeb a utilisé des membres de gangs pour faire pression sur certains douaniers du port afin que ses conteneurs ne soient ni inspectés ni interceptés, ce qui lui a permis d’éviter certains droits d’importation. Enfin, comme le G9 contrôle la zone autour du port de l’Autorité portuaire nationale et les routes qui y mènent, M. Deeb, comme d’autres grands importateurs, paie les gangs pour que sa marchandise passe par leur territoire.

De plus souligne ce rapport, entre septembre et décembre 2019, toutes les activités économiques du pays ont été bloquées, à travers le mouvement appelé peyi lok. L’opposition politique, soutenue par des acteurs économiques, dont M. Deeb, a demandé à la population de rester chez elle dans un mouvement de protestation visant à faire pression sur le Président Moise pour qu’il démissionne. Les transports publics ont été paralysés en raison de la pénurie de carburant, les écoles ont été fermées et les réserves de nourriture ont chuté, car les barricades et la violence empêchaient la libre circulation des personnes et des biens à travers le pays, coupant les régions de la capitale. Affairiste, M. Deeb, profitant de la forte demande de produits alimentaires, a soudoyé des députés, qui ont ensuite payé des chefs de gangs pour que ceux-ci dispersent les manifestants pour débloquer les rues afin de permettre l’entrée de ses marchandises dans le pays.

Youri Latortue

Youri Latortue, qui fait déjà l’objet de sanctions du Canada et des Etats-Unis, exerce un contrôle considérable sur la vie politique et économique du département de l’Artibonite, notamment par le recours à des gangs, comme Raboteau, qu’il finance et arme, précise le rapport. Plus récemment, des sources confidentielles ont dit au Groupe d’experts que M. Latortue avait également financé le gang Kokorat Sans Ras, un groupe extrêmement violent du département de l’Artibonite, en collusion avec Raboteau. M. Latortue a eu recours à des gangs pour assurer sa protection rapprochée et détruire des biens.

Prophane Victor

Pour l’ancien député Prophane Victor , le rapport avance que pour assurer son élection en 2016 et son contrôle sur la région, il a commencé à armer des jeunes de Petite Rivière de l’Artibonite, qui ont ensuite formé le gang Gran Grif, actuellement le plus important du département de l’Artibonite et principal responsable des violations des droits humains, y compris les violences sexuelles. L’ancien parlementaire a continué à soutenir Gran Grif jusqu’en 2020, date à laquelle le gang et lui se sont brouillés à la suite de promesses non tenues faites pendant la période électorale. Depuis, il soutient des gangs rivaux et des groupes d’autodéfense dans la région. Outre les éléments de preuve recueillis par le Groupe d’experts, M. Victor fait l’objet de sanctions par le Canada depuis juin 2023.

Sources de revenus des gangs

Le rapport du Groupe d’experts a également exploré la question du financement ou des sources de revenus des gangs. Il est arrivé à la conclusion que l’extorsion, le vol et le détournement de véhicules de transport de personnes et de véhicules privés de toutes tailles sont une source importante de revenus pour les gangs qui contrôlent les routes nationales. Les camions de transport de marchandises sont particulièrement intéressants car ils transportent des marchandises de valeur (carburant ou produits manufacturés). Une rançon de 1 000 à 3 000 dollars est versée par camion détourné, en fonction de sa taille et de la valeur de sa cargaison. La situation est similaire le long de la RN2 à Martissant, où les gangs 5 Segond, Grand Ravine et Ti Bois sévissent. Aussi, les gangs rançonnent les entreprises et les institutions, y compris les écoles, dans les zones qu’ils contrôlent. En outre, ils taxent la population pour des services publics qu’ils ne fournissent pas vraiment, comme l’eau ou l’électricité.

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